Suite à un voyage aux États Unis, Dominique Vuillon et sa femme Denise ont décidé d’importer le concept des AMAPS. Leur première AMAP a été créée en 2001 avec un groupe de consommateurs d’Aubagne et des militants de l’association ATTAC. C’est un véritable succès puisqu’on dénombre aujourd’hui plus de 250 000 personnes en France qui se nourrissent grâce à ce système.
Peut-on se nourrir autrement ? Pourquoi le concept des amaps apparaît comme une alternative efficace ?
La production est de plus en plus industrielle puisque la demande est de plus en plus concentrée donc plus standardisée. En 20 ans nous avons perdu 3 paysans sur 4, c’est dramatique ! Il n’existe pas de subventions de l’Europe, nos pratiques sont malheureusement marginalisées et c’est une erreur politique grave. D’autant plus qu’on fait la démonstration que c’est possible de produire des produits de grandes qualités sans nuire à l’environnement de plus, c’est économiquement c’est viable et abordable. Aujourd’hui, il est possible de reprendre des milliers de productions qui ont disparu. Cela peut créer beaucoup d’emplois, la preuve, on passe notre temps à installer des jeunes couples qui ont envie de s’investir. Ça pourrait aller encore plus vite si il n’y avait pas de problème foncier qui nous handicape beaucoup.
En Loire Atlantique nous installons plus de jeunes en AMAP que la Chambre d’Agriculture, c’est un département ou la courbe des disparitions a baissé, on a plus d’installations que de départs ! Il faut arriver à ce résultat partout pour avoir des petites unités de production sur tout le territoire. On installe des couples en maraichage sur 2 hectares, ainsi ils peuvent en ayant un revenu décent, nourrir 80 familles.
Les 5000 producteurs qui le font aujourd’hui sont la démonstration que c’est possible de vivre différemment. On peut s’affranchir de ce système d’économie de marché qui spécule sur une fonction nourricière qui est l’acte de se nourrir. Si il y a bien un endroit ou il faut sortir du marché c’est sur les fonctions vitales de notre espèce, l’eau, l’air, la nourriture, si il nous manque un de ces éléments on ne peut pas vivre et si il est de mauvaises qualités on est malade. Les nombreuses famines et l’augmentation de la population sur terre nous pousse à sortir de ce système. L’agro-industrie n’est pas le seul modèle possible pour arriver à nourrir tout le monde. Nous revendiquons seulement notre droit à l’existence. Les systèmes alternatifs ont le droit d’exister, il faut qu’on est le choix autant pour le producteur que pour le consommateur. Quand on a plus le choix on est dépendant d’un système dominant.
Comment l’industrie agro-alimentaire et plus spécifiquement la grande distribution essaie-t-elle de contrer cette concurrence qui selon les chiffres séduit de plus en plus les consommateurs que ce soit en France, au japon ou aux États-Unis ?
Même dans des pays franchement libéraux, on s’est rendu compte que ce concept se maintenait et plus étonnant encore, il se développait dans ces pays ! Les opposants en face n’ont pas les moyens de le bloquer. Parce que chaque groupe de consommateurs avec son producteur est complètement autonome, c’est un concept insaisissable et incontrôlable ! Dès lors que le concept n’est pas structuré de façon pyramidale, ou on pourrait le déséquilibrer, nous sommes comme protégés. Rien ne peut nous attaquer. Elle est ici la force de ce système, il se répand par tâche d’huile, de façon horizontale. C’est impossible à saisir parce que nous n’avons pas de fédération ni d’organisation. A quoi ça peut servir ? Moi, je n’en vois pas l’utilité, ce n’est pas important pour nous. C’est le système « du bouche à oreille » qui nous aide, c’est un mouvement citoyen, c’est apprendre à chacun à se responsabiliser, c’est cette démarche qui est la plus importante. L’acte d’achat c’est un acte qui responsabilise. En tant que producteur, produire de la nourriture, qui apporte plaisir et santé c’est le cœur de notre métier. Tous les jours, le productivisme invente des solutions qui nous amènent des vagues supplémentaires de consommateurs. Là on est tranquille, pas besoin de publicités !
Denis Vuillon : « L’Histoire de la Première AMAP. Soutenir les paysans pour se nourrir durablement »
Aux éditions l’Harmattan
Alerte : Fraudes Massives à la Fausse Nourriture
Commenter cet article