L’érythrosine, un colorant rouge vif utilisé dans près de 3.000 produits alimentaires, est désormais interdite aux Etats-Unis mais pas totalement en Europe, où il est utilisé par 181 médicaments sous forme de gélules
La liste complète des médicaments
où l'E127 est présent est disponible
sur le site du Quotidien du pharmacien.
L'essentiel
- Les autorités américaines ont annoncé l’interdiction du colorant rouge érythrosine (E127 ou « Red 3 »), utilisé dans environ 3.000 produits alimentaires aux États-Unis, après des décennies de controverse sur ses effets cancérigènes potentiels.
- « Les études sur l’homme montrent que les colorants alimentaires synthétiques sont associés à des effets neurocomportementaux néfastes chez les enfants », alertait un rapport du gouvernement de Californie en 2021.
- Dans l’Union européenne, l’érythrosine est autorisée de manière limitée dans l’alimentation mais reste largement utilisée dans l’industrie pharmaceutique. « En matière de précaution sanitaire, les produits de santé sont parfois plus mal lotis que les bonbons », s’étonne l’UFC-Que Choisir.
Il était connu depuis plus de trente ans pour provoquer des cancers chez les rats… mais était toujours autorisé pour les hommes. Les autorités américaines ont annoncé, mercredi, l’interdiction de l’utilisation d’un colorant rouge controversé. Une « victoire monumentale pour la santé et la sécurité des consommateurs », a salué Ken Cook, président d’EWG, une association environnementale.
Nommé érythrosine, cet additif synthétique est aussi connu sous l’appellation E127 en Europe et « Red 3 » en Amérique du Nord. Il sert à donner aux aliments ou aux gélules de médicament un aspect rose à rouge vif. On le trouvait dans environ 3.000 produits alimentaires aux Etats-Unis, selon la base de données d’EWG : bonbons, fruits en conserve ou encore boissons.
Effets neurocomportementaux
Il était déjà interdit aux Etats-Unis depuis 1990 dans les cosmétiques et les médicaments directement appliqués sur la peau, en raison de risques d’allergie et de suspicions sur son caractère cancérigène pour l’homme. Pourtant, selon l’Agence américaine de contrôle alimentaire et pharmaceutique (FDA), les preuves ne permettent pas d’établir à ce jour un tel risque. Elle évoque notamment des différences de mécanismes hormonaux entre les espèces. Mais elle décide de l’interdire par mesure de précaution, comme l’y oblige une loi fédérale. Une requête avait été déposée en ce sens en 2022 par plusieurs associations de consommateurs.
« Les études sur l’homme montrent que les colorants alimentaires synthétiques sont associés à des effets neurocomportementaux néfastes chez les enfants », alertait également un rapport du gouvernement de Californie en 2021.
Coloration des gélules de nombreux médicaments en Europe
« Le Red 3 n’est pas le seul problème, c’est le symptôme d’une problématique plus large », insistait récemment le scientifique Thomas Galligan, membre de l’une des associations à avoir saisi la FDA. Elles mettent en cause les autorités sanitaires américaines pour leur lenteur à agir et dénoncent les efforts menés par les lobbys agroalimentaires et pharmaceutiques pour maintenir un statu quo.
Les colorants synthétiques « n’ajoutent aucune valeur nutritionnelle et ne conservent pas les aliments. Ils ne servent qu’à (les) embellir » et pourraient donc être enlevés, selon M. Galligan.
Dans l’Union européenne, l’érythrosine est exclusivement autorisée dans l’alimentation pour les cerises en conserve et pour cocktail. Mais est utilisée par l’industrie pharmaceutique pour colorer notamment les gélules. En 2023, l’UFC Que Choisir avait dénombré 181 spécialités pharmaceutiques contenant de l’érythrosine. L’union de défense des consommateurs relevait une problématique identique avec le dioxyde de titane, autre additif alimentaire et autre colorant (blanc pour sa part). Lui aussi est soupçonné d’être cancérogène. Banni des aliments, il n’est toujours pas interdit dans les médicaments. Avant de s’étonner qu’en « termes de précaution sanitaire, les produits de santé sont parfois plus mal lotis que les bonbons ».
Un colorant présent dans les gélules de paracétamol
L’E127 est un additif synthétique utilisé pour embellir les aliments et les médicaments, en leur donnant une couleur rose à rouge vif. Créé à partir de pétrole, il n’ajoute aucune valeur nutritionnelle et n’aide en rien à leur conservation.
Bonbons, fruits en conserve, boissons ou encore substitut végétarien au bacon, le colorant a été retrouvé dans presque 3 000 produits alimentaires commercialisés aux États-Unis, selon la base de données de l’association américaine EWG.
Au sein de l’Union européenne, il est en revanche très peu utilisé dans l’alimentation. On le retrouve exclusivement dans les cerises en conserve et pour cocktail. L’additif est davantage utilisé dans les médicaments, l’industrie pharmaceutique l’utilisant pour colorer des gélules de paracétamol (Biogaran, Arrow ou EG entre autres). En 2023, l’association UFC-Que choisir a compté 181 spécialités contenant de l’E127, conseillant aux consommateurs de les débusquer en regardant avec attention la notice.
Suspecté d’être cancérigène
Le colorant est interdit dans les cosmétiques et dans les médicaments à appliquer sur la peau depuis une trentaine d’années aux États-Unis, en raison des risques d’allergie et de perturbations de la thyroïde qu’il pourrait engendrer. Deux études ont ainsi montré qu’une exposition au colorant pouvait provoquer des cancers chez des rats de laboratoire.
Dans son communiqué, la FDA se veut prudente : « Les niveaux d’exposition pertinents pour l’homme sont généralement bien inférieurs à ceux qui provoquent les effets observés chez les rats mâles. » Elle ajoute que les études menées sur d’autres espèces n’ont pas montré ce lien. Si elle se base sur son caractère « cancérigène » pour interdire le colorant, la FDA précise qu’il n’existe pas de preuve montrant le lien chez l’humain, avançant des « différences de mécanisme hormonal entre les espèces ».
D’autres recherches ont pointé un lien avec des troubles du comportement chez les enfants. « Les études sur l’homme montrent que les colorants alimentaires synthétiques sont associés à des effets neurocomportementaux néfastes chez les enfants », précisait un rapport du gouvernement californien en 2021, ajoutant que la sensibilité des enfants aux colorants alimentaires synthétiques pouvait varier.
Pour justifier l’autorisation de l’érythrosine dans les cerises confites, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) expliquait qu’une personne devait en consommer 30 grammes pour dépasser la dose journalière recommandée, ce qui n’était pas susceptible de se produire fréquemment.
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