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On parle souvent de l’influence croissante de la Chine en Afrique, mais la percée chinoise en Europe de l’Est et notamment dans les Balkans est souvent oubliée. Une très vague coopération sino-albanaise existait déjà dans les années 70, mais dans les années 80, la Chine développa une réelle doctrine a l’égard de l’Europe du Sud-est.
Les Balkans sont d’abord apparus comme un double front pour la Chine, tout d’abord vers l’Europe, mais également dans l’ex-sphère soviétique. Après la chute du mur, Pékin renforça son influence sur les Balkans en se focalisant sur le potentiel commercial de ces derniers. L’objectif de Pékin est évidemment d’utiliser les consommateurs des Balkans pour écouler les produits chinois bon marché. Les relations commerciales entre la Chine et les Balkans se sont d’abord développées avec la Bulgarie, la Roumanie mais aussi avec la Croatie. En 2010, les échanges bilatéraux avec Bucarest se chiffraient à 2,6 milliards d’euros, alors que les affaires avec Zagreb et Sofia étaient eux respectivement évaluées à 1,1 milliard d’euros et 630,5 millions d’euros. Quand à la Serbie, les échanges avec la Chine se sont élevés à 325 millions d’euros en 2010 malgré l’historique de très bonnes relations entre la Chine et la Serbie de Milosevic. Symboles de cette percée chinoise dans les Balkans, l’implantation et l’ouverture en 2010 et 2011 de gigantesques « Chinatowns » en banlieue de Belgrade, Bucarest ou Zagreb.
L’implantation chinoise n’est pas seulement commerciale, mais aussi industrielle.
On peut citer par exemple le cas du géant Dongfeng qui a signé fin 2009 un accord avec le constructeur serbe Fabrika Automobila Priboj (FAP) afin d’assembler des véhicules en Serbie, ou Great Wall Motor Corporation et la firme bulgare Litex Motors qui ont commencé à produire des voitures low-cost en février 2011. La Chine a aussi développé une politique d’investissement dans l’exploitation minière locale afin d’alimenter la croissance rapide de l’économie chinoise. C’est le cas par exemple de la firme métallurgique chinoise China Minmetals Corporation, qui a signé un accord avec Aurubis Bulgaria, filiale du plus grand producteur de cuivre européen. Ou encore de Sichuan Jiannanchun International Group et du turc Kürüm Energy Resources and Metallurgy, qui forment la joint-venture Illyria Mineral Industry visant au développement des exportations albanaises de ferrochromes vers la Chine.
D’autres projets similaires sont également en négociations dans divers points des Balkans.
La Grèce est une illustration stupéfiante de cette percée chinoise puisque la Chine a largement soutenu l’économie du pays au plus fort de la crise en achetant des bons du trésor grecs, mais surtout en signant un contrat de 3,4 milliards d’euros permettant au géant maritime China Ocean Shipping Company de rénover et contrôler une partie du port du Pirée. L’accord a autorisé la société à augmenter la capacité logistique du port en y construisant un troisième quai et aussi un centre logistique. Pékin a aussi mis en place un fond spécial sino-grec de cinq milliards de dollars pour le développement du transport maritime et envisage de tripler les opérations annuelles du port en portant à 3,7 millions de containers le trafic annuel d’ici 2015 et monter ainsi le commerce bilatéral annuel avec Athènes à huit milliards de dollars.
Mais la China Ocean Shipping Company lorgne aussi sur le port de Thessalonique, qui est relié par une voie ferrée au reste des Balkans mais également à l’Europe centrale.
Cette prise de contrôle chinois sur le transport maritime et ferroviaire grec a un objectif clair : transformer la Grèce en une sorte de « hub logistique » pour écouler les produits chinois vers l’Europe. /N
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