Le gouvernement a beau promettre des augmentations de salaires aux enseignants, la contestation ne faiblit pas.
La grève ce mardi s’annonce même plus suivie que la semaine dernière.
Il est d'un naturel enjoué et optimiste mais cette fois le cœur n'y est plus. Philippe ( le prénom a été changé ), instituteur dans l'est de la France, en a « ras le bol ». Ras le bol de sa classe à double niveau de 30 enfants, en CP-CE1. Ras le bol de se sentir « incompétent » face à cet enfant handicapé pour lequel il n'a pas de solution pédagogique. Ras le bol de « remplir des carnets le soir » et se dire que, peut-être, ce quotidien usant sera le sien jusqu'à 64 ans à cause de la réforme des retraites, « la goutte d'eau de trop », dit-il. Ce mardi, il sera en grève pour la deuxième fois en deux semaines.
Dans les écoles, entre un quart et la moitié des professeurs devraient cesser le travail ce mardi, selon les estimations respectives du ministère de l'Education nationale et du Snuipp, le principal syndicat du primaire. Cette troisième journée de mobilisation, qui devrait perturber les classes dans toute la France et pas seulement en région parisienne, s'annonce davantage suivie que la semaine dernière. Comme si les annonces du Premier ministre Édouard Philippe, et l'a
Une fourchette de 10 milliards d'euros
« Les enseignants ne croient plus le ministre, après tout ce qui s'est passé », cingle Élisabeth Kutas, professeure des écoles et déléguée du Snuipp à Paris, où plus d'un enseignant sur deux devrait être absent ce mardi. Dans son viseur : l'épineux dossier de la revalorisation du salaire des enseignants, attendu depuis deux ans et toujours repoussé jusqu'ici.
Le ministre de l'Education nationale, qui a reçu vendredi et lundi l'ensemble des syndicats, n'est, cette fois, pourtant pas arrivé les mains vides à la table des négociations. Il propose de « sanctuariser » le niveau de retraite des enseignants dans la réforme, grâce à une augmentation substantielle de leurs revenus.
Pour ce faire, une fourchette de 10 milliards d'euros serait débloquée sur « quinze à vingt ans », indique la Rue de Grenelle. Les premières augmentations prendraient effet dans un an, en janvier 2021, et la montée en puissance, les années suivantes, serait inscrite dans une « loi de programmation » qui devrait être déposée en juin, à l'issue de six mois de dialogue social.
«Trop d'inconnues»
« Les éléments sont extrêmement intéressants », reconnaît sous couvert d'anonymat, un responsable syndical, qui pourtant appelle ses troupes à la grève, ce mardi. Car, si les objectifs affichés par le gouvernement sont clairs, et plutôt à l'avantage des professeurs, les moyens pour y parvenir restent nébuleux. « C'est une équation à beaucoup trop d'inconnues », résume Stéphane Crochet, le secrétaire général du syndicat réformiste SE-Unsa. « Les collègues ont dû mal à croire à une annonce qui s'étale sur trois quinquennats », abonde Sophie Venetitay, secrétaire national du Snes, majoritaire dans les collèges et les lycées.
La proposition de Jean-Michel Blanquer, d'assortir cette hausse des salaires d'une vaste réflexion sur « le métier d'enseignant au XXIe siècle » ouvre aussi un abysse de questions… et de rumeurs sous les préaux. Olivier, professeur d'histoire géographie au lycée Maurice-Gennevoix, à Montrouge (Hauts-de-Seine), en grève depuis six jours, en a conclu que « les augmentations ne se feront pas sans contrepartie ». Ce qu'il juge comme « une injustice de plus ».
Commenter cet article