C'est un sujet, on ne peut plus délicat. En France, la religion musulmane est, parfois, associée, à tort, à une menace. Certains ont trouvé refuge au Royaume-Uni. Un Eden pour vivre ses croyances en toute quiétude ? Évidemment, les musulmans ne représentent pas la seule catégorie de Français qui décident, du jour au lendemain, de s’installer outre-Manche. Le journaliste Christian Roudaut, dans son livre intitulé "France, je t'aime, je te quitte" fait, d’ailleurs, l’inventaire de tous ces mal aimés. Mais nos compatriotes musulmans (souvent convertis ou très jeunes), sont les seuls à le faire, pour des motifs religieux, et, surtout, ils sont les plus vindicatifs, lorsqu’ils évoquent la France une fois partis. D’où à mon avis, l’intérêt particulier de ce problème.
Il y a quelques jours, le permis de construire de la future mosquée de Marseille a été retardé, suite à l’action de commerçants dénonçant, (je cite) "les incertitudes, quant aux modalités de stationnement devant l’édifice". Au beau milieu du dispositif de l’arrêt, les juges du tribunal administratif de Marseille invoquent même la hauteur du minaret, pour son "impact visuel", pour motiver leur décision.
Notre pays a forgé son histoire récente sur la lutte contre l’opium du peuple. La loi de 1905 sur la séparation de l’Eglise (lisez du spirituel) et de l’Etat (temporel) a constitué l’apogée de cette lutte, même si l’église catholique a réussi à obtenir de l’Etat l’entretien de plusieurs de ses édifices classés "monuments historiques", au prix d’une contorsion juridique nécessaire, à l’époque, pour calmer les esprits surchauffés de l’époque.
Depuis les cathos sont rentrés dans les rangs. Les Musulmans, jadis, cantonnés aux colonies, avec un code coutumier musulman qui leur était applicable, débarquent, en masse, en métropole, après la Seconde guerre mondiale. Ils emmènent avec eux leurs coutumes, leurs mœurs et il faut bien s’adapter à cette nouvelle donne. La grande mosquée de Paris avait été construite, auparavant, en 1926, en hommage aux Musulmans ayant combattu, pour la France, en 14-18.
On n’imaginait pas, à l’époque, que les prochaines mosquées devraient être construites, à l’avenir, par nécessité, compte tenu de la ferveur des Musulmans et la multiplication des conversions à cette religion, alors que, dans le même temps, l’église catholique décline. Les laïcistes de tous bords voient, alors, dans cette "expansion", une menace, comme ils voyaient, jadis, dans le catholicisme, une entrave à la liberté de pensée. Une croisade, dont le dernier acte vient de se jouer, à Marseille, est, alors, lancée contre ce que certains considèrent comme un envahissement.
"La France tu l’aimes ou tu la quittes", appliqué à la lettre
Ce célèbre appel de Nicolas Sarkozy, en 2007, (on fait les appels qu’on peut), certains de nos compatriotes musulmans l’ont appliqué à la lettre, en décidant de s’installer, au Royaume-Uni, pays dans lequel la religion n’est pas séparée de l’Etat et où les Musulmans jouissent d’une plus grande liberté de culte, du fait essentiellement, de l’absence, chez nos amis anglais, de cette culture assimilationniste, qui a forgé l’histoire de la nation française.
Rencontrée, par hasard, à la station de métro St Paul, à Londres, (j’ai été trahi par mon accent que je pensais, pourtant, perfectly british), Samia, une jeune Française travaillant à la City n’est pas au courant de l’élection des députés des Français de l’étranger, l’an prochain. Elle est inscrite au consulat (déjà, un bon point, Samia), mais ne compte pas voter. Elle ne se sent pas concernée par ce qui se passe, en France, et les dernières nouvelles glanées ça et là (elle regarde encore France 2 sur Internet... faut quand même pas exagérer) ne la rassurent pas sur d’éventuelles possibilités d’évolution qui feraient qu’elle s’investisse un peu plus. En revanche, elle votera aux présidentielles, pour, dit-elle, "en finir avec Sarkozy qui fait beaucoup de mal à la France".
Mais Samia ne compte pas rentrer en France, pour autant. Elle se sent bien à Londres. Ses parents vivent toujours à La Courneuve et elle leur rend visite, au moins, une fois, par mois, mais éprouve vite le besoin de rentrer, à peine, arrivée. Samia porte le foulard et ne se sent pas montrée du doigt, lorsqu’elle se rend à son travail. Elle pense que "l’obsession à combattre les religions", en France, produit des effets pervers. Tout ceci accumulé aux discriminations fondées sur d’autres motifs que la religion l’ont convaincue de partir.
Article initialement publié sur le blog Yes Will Can.
source: Irib.fr
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