- Situé entre Oman et l’Iran, ce détroit est la voie d’accès la plus importante au monde pour le transport maritime de pétrole. La république islamique serait la première affectée et entraînerait le monde entier dans son sillage.
Tous les regards sont braqués sur l’escalade des tensions entre Israël et l’Iran. Plusieurs frappes israéliennes mortelles ont visé vendredi des sites nucléaires et des dirigeants militaires iraniens. Des attaques auxquelles Téhéran a riposté dans la foulée. Face à cette poussée de fièvre, la fermeture du détroit d’Ormuz est sérieusement envisagée par l’Iran, selon Esmail Kosari, membre de la commission de sécurité du Parlement. Ce n’est pas la première fois que le pays menace de bloquer ce passage, quelles seraient les conséquences d’une telle fermeture pour l’économie mondiale ?
L’enjeu est de taille…
Israel-Iran : l’impact d'une guerre sur les prix du pétrole, les scénarios possibles
Pétrole. Alors que le prix du baril a grimpé à 75 dollars, les futurs choix diplomatiques des Etats-Unis pourraient provoquer une réaction désespérée de l’Iran, comme la fermeture du détroit d'Ormuz.
Les prix du pétrole ont augmenté d’environ 10 % vendredi 13 juin, en réaction direct aux bombardements israéliens sur l’Iran. Le baril WTI (la référence du prix du pétrole aux États-Unis) a atteint 75 dollars, tandis que celui de Brent de la mer du Nord (la référence en Europe) est à 76 dollars. Une réaction rare et surtout brutale, car la tendance était plutôt ces derniers mois à une baisse du prix du pétrole. Mais pas inattendue, les acteurs du marché surveillaient déjà depuis plusieurs jours la tension grandissante entre l’Iran, Israël et les Etats-Unis.
Cette hausse ne s'explique pas par une réduction de la production ou l'approvisionnement, les frappes de vendredi n’ayant pas touché les infrastructures pétrolières iraniennes. Mais les investisseurs craignent que ce ne soit qu'une question de temps, l'Iran ayant averti immédiatement que ses forces armées n'auraient "pas de limite" dans leur riposte, commencée dès ce samedi. Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, a de son côté affirmé que les frappes contre l'Iran se poursuivront "aussi longtemps qu'il le faudra". Quant au président américain Donald Trump, celui-ci a prévenu que la prochaine action d'Israël pourrait être "encore plus brutale". De quoi donner au marché du pétrole de bonnes raisons de s'inquiéter. C'est le principe de la prime de risque géopolitique : le baril prend de la valeur quand les investisseurs ne sont pas certains de pouvoir en acheter aussi facilement à l’avenir.
L’enjeu du détroit d'Ormuz
L’Iran se classe 10e producteur mondial de pétrole. Si ses installations de production et d’exportation de pétrole devaient être ciblées par Israël, qui continue actuellement de bombarder le pays, un blocage total du brut iranien reviendrait à priver l’approvisionnement mondial d’1,7 millions de barils par jour, indique le quotidien américain The Economist. Ce qui pourrait porter le prix du Brent à au moins 80 dollars le baril, voire jusqu'à 90 dollars, selon les analystes.
Un blocage total du brut créerait un gouffre que les voisins du Golfe de l’Iran, membres principaux l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), pourraient néanmoins largement combler grâce à leurs nombreux puits inutilisés. L'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis disposent à eux seuls de 3 à 4 millions de barils par jour de capacité inutilisée, qui pourraient alors éventuellement servir en cas de crise. L’Iran est donc un producteur important, mais pas suffisamment central pour bouleverser complètement le marché.
En réalité, la véritable crainte porte sur le détroit d'Ormuz, un passage maritime stratégique du Moyen-Orient, reliant le golfe Persique à la mer d'Arabie, et donc à l’océan Indien. C’est l’un des points de passage les plus importants au monde pour le transport du pétrole. Or, il est contrôlé par l'Iran. Et rien ne dit que dans un geste désespéré face à un Israël de plus en plus agressif, il ne décide de fermer le détroit. S'il devait prendre une telle décision, environ 20 % des livraisons pétrolières mondiales se retrouveraient gelées, selon la U.S. Energy Information Administration. Cela équivaudrait à 15 à 18 millions de barils en moins par jour. Environ 25 % du gaz naturel liquéfié serait aussi bloqué.
L’avenir pétrolier dans les mains de la diplomatie américaine
L’Iran a-t-il une raison de vouloir fermer ce détroit ? Oui. Le pays vient d’être largement affaibli par l’attaque israélienne, qui a largué des bombes sur une centaine de sites militaires et liquidé les deux principaux généraux du pays, le chef d’état-major et le chef des Gardiens de la révolution. Le tout par surprise, en utilisant la couverture du processus diplomatique encouragé par les Etats-Unis autour du nucléaire iranien. Les prochaines discussions, très attendues, entre l’Iran et l’émissaire américain Steve Witkoff devaient se tenir dimanche sous médiation omanaise, mais il est désormais très peu probable qu'elles soient maintenues.
Menacer de fermer ce détroit est un levier de pression stratégique : cela montre qu’en cas de confrontation, l’Iran peut perturber un flux vital pour l’économie mondiale, ce qui lui donne un moyen de négociation important. Or, certains responsables iraniens accusent Washington d’être complice de l’attaque israélienne, ce qui met largement en péril de futures solutions diplomatiques, que ce soit autour du nucléaire ou en lien avec le conflit régional en cours.
Il est d’ailleurs probable que la situation diplomatique entre l'Iran et les Etats-Unis s’envenime encore : si aucun accord sur le nucléaire iranien n’est atteint, des sanctions américaines plus larges pourraient être mises en place, dans le cadre de la stratégie de "pression maximale" contre Téhéran voulue par Donald Trump.
Jusqu’à 100 dollars le baril
La fermeture du détroit d’Ormuz pourrait alors être l’une des seules manières pour l’Iran de montrer sa capacité à défendre son territoire et ses intérêts. En cas de fermeture d’Ormuz, 85 % des exportations de l’Irak, et la totalité de celles du Koweït, d’Oman et du Qatar, n’auraient aucune autre voie d’acheminement. "Dans ce cas, le Brent pourrait dépasser rapidement les 100 dollars le baril", juge auprès de The Economist Michael Haigh, responsable mondial de la recherche sur les matières premières pour la banque Société générale.
"Une décision risquée", pour l'hebdomadaire britannique. Car non seulement le détroit est vital pour l’Iran lui-même, mais les Etats-Unis (dont le président veut maintenir les prix bas) et la Chine (qui dépend des importations de pétrole du Golfe) enverraient probablement leurs forces marines pour débloquer la voie. Si l’Iran a plusieurs fois menacé de bloquer le détroit d’Ormuz, il n’a pour l’instant jamais osé passer à l’action.
En coulisses, la panique grandit ...
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