L’Allemagne a annoncé lundi 9 septembre l’instauration temporaire
de contrôles à l’ensemble de ses frontières, deux semaines après l’attentat perpétré à Solingen et au lendemain de la percée historique du parti d’extrême-droite AfD lors d’un scrutin régional. La décision de Berlin pourrait avoir de sérieuses répercussions chez ses voisins.
Berlin a pu prendre cette mesure grâce à la nouvelle réforme du code Schengen adoptée en 2024 - Crédits : RobsonPL / iStock
“Nous renforçons la sécurité intérieure et poursuivons notre lutte contre l’immigration clandestine”, a déclaré la ministre fédérale allemande de l’Intérieur Nancy Faeser lors d’une conférence de presse mardi.
A partir du 16 septembre, les contrôles aux frontières allemandes seront ainsi renforcés pour une période d’au moins six mois.
Cette décision intervient deux semaines après une attaque au couteau causant la mort de trois personnes à Solingen, dans l’ouest du pays. L’Allemagne est également marquée par la victoire du parti d’extrême-droite AfD (Alternative für Deutschland) en Thuringe. La politique d’asile et d’immigration était revenue au cœur des débats lors de ce scrutin régional.
En conformité avec le droit européen
Avant l’annonce officielle, l’Allemagne avait notifié au préalable la Commission européenne et les pays limitrophes de son intention de renforcer les contrôles aux frontières. Nancy Faeser assure que la décision a été prise en conformité avec le droit européen. Une réforme du code Schengen, adoptée le 24 mai 2024, permet en effet à un Etat d’autoriser le rétablissement des contrôles aux frontières en cas de menace grave pour sa sécurité, pour une durée maximale de deux ans, renouvelable un an.
La Commission européenne a néanmoins annoncé qu’elle allait évaluer la nécessité de ces mesures, qui doivent être prises dans des circonstances exceptionnelles.
Pour la ministre de l’Intérieur, ces contrôles plus réguliers et plus stricts doivent permettre par ailleurs de renvoyer les demandeurs d’asile vers le pays par lequel ils sont entrés sur le territoire européen. L’Allemagne est le pays de l’Union où le nombre de demandes d’asiles est le plus élevé, avec plus de 300 000 primo-demandeurs en 2023.
Des conséquences pour ses voisins
La décision allemande est loin d’être une exception. L’UE voit depuis plusieurs années se succéder des dérogations à la libre-circulation, lors de la crise syrienne en 2015 puis durant la pandémie de Covid-19. Un nouvel effet domino est redouté, et l’Autriche a déjà annoncé qu’elle refuserait d’accueillir les personnes refoulées d’Allemagne, rapportent Les Echos.
Du côté du voisin polonais, cette décision ne passe pas. Varsovie fustige une décision “inacceptable”. “Ce dont la Pologne a besoin, ce n’est pas d’un renforcement des contrôles à nos frontières, mais d’une plus grande participation des pays, y compris de pays comme l’Allemagne, à la surveillance et à la sécurisation des frontières extérieures de l’Union européenne”, a ainsi indiqué le chef du gouvernement polonais Donald Tusk.
Des mesures exceptionnelles et temporaires. L'Allemagne a annoncé lundi 9 septembre instaurer des contrôles à l'ensemble de ses frontières pour lutter contre l'immigration illégale, redevenue un sujet politique majeur pour le gouvernement d'Olaf Scholz face à la montée de l'extrême droite.
"Nous continuons d'appliquer notre ligne dure contre l'immigration irrégulière", a déclaré la ministre de l'Intérieur Nancy Faeser en évoquant ces nouvelles mesures.
Ainsi, des contrôles avec la France, le Luxembourg, les Pays-bas, la Belgique et le Danemark vont être établis pendant six mois à partir du 16 septembre. Ils s'ajouteront aux contrôles déjà en place aux frontières avec la Pologne, la République tchèque, l'Autriche et la Suisse.
Berlin juge ces dispositions nécessaires pour "la protection de la sécurité intérieure contre les menaces actuelles du terrorisme islamiste et de la criminalité transfrontalière", deux semaines après l'attentat de Solingen revendiqué par le groupe Etat islamique.
Pourquoi cette annonce arrive maintenant ?
Berlin juge ces dispositions nécessaires pour « la protection de la sécurité intérieure contre les menaces actuelles du terrorisme islamiste et de la criminalité transfrontalière ». La semaine dernière, une tentative d’attentat a visé le consulat général d’Israël à Munich, menée par un Autrichien de 18 ans connu pour avoir des sympathies islamistes.
La politique d’asile et d’immigration est revenue au centre des débats en Allemagne avec la forte poussée du parti d’extrême-droite AfD, qui a obtenu des résultats record à deux élections régionales début septembre. Un nouveau parti de gauche, l’Alliance Sahra Wagenknecht (BSW), qui réclame un contrôle plus étroit des flux migratoires, a aussi effectué une percée spectaculaire pendant ces élections.
Le débat, déjà houleux, à propos de la politique d’asile a été alimenté par le triple meurtre perpétré fin août dans l’ouest de l’Allemagne, à Solingen, dont l’auteur présumé est un Syrien de 26 ans qui aurait dû être expulsé. Dans la foulée de cette attaque, le gouvernement a annoncé la suppression des aides aux demandeurs d’asile entrés dans un autre État de l’UE avant d’aller en Allemagne.
Berlin veut aussi accélérer l’expulsion de réfugiés ayant fait l’objet d’une condamnation pénale. L’Allemagne a ainsi procédé fin août au renvoi dans leur pays de 28 Afghans condamnés pour crime, une première depuis le retour au pouvoir des talibans en août 2021.
3. Quelles sont les réactions ?
La Commission européenne a plaidé mardi pour des mesures « proportionnées » et qui doivent rester « exceptionnelles », alors que l’Allemagne vient d’annoncer le durcissement de sa politique migratoire avec des contrôles à l’ensemble de ses frontières. Le rétablissement de contrôles aux frontières internes de l’Europe est « une possibilité », mais ceux-ci doivent être « nécessaires et proportionnés », a souligné une porte-parole de la Commission à Bruxelles. « De telles mesures doivent rester strictement exceptionnelles », a-t-elle insisté.
Ce durcissement pourrait toutefois tendre les relations entre l’Allemagne et ses voisins, surtout que la coalition au pouvoir a aussi déclaré lundi vouloir augmenter les refoulements aux frontières. L’Autriche a déjà prévenu qu’elle « n’accepterait pas les personnes refoulées d’Allemagne », selon des propos du ministre de l’Intérieur, Gerhard Karner, au quotidien « Frankfurter Allgemeine Zeitung ».
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