Lors du dernier ECOFIN (le conseil des ministres des Finances de l’Union, présidé par le belge Didier Reynders, les ministres des Finances de l’Union ont rendu un avis tout à fait explicite sur les mesures prioritaires à prendre dans l’Union en matière de finances publiques :
il est nécessaire de poursuivre une stratégie appropriée dans tous les domaines liés au vieillissement de la population en tenant compte des situations propres à chaque pays, tout en évitant toute mesure allant à contre-courant des réformes déjà entreprises pour renforcer la viabilité des systèmes. Il s’agit notamment de prendre de nouvelles mesures pour relever l’âge effectif de départ à la retraite, y compris en œuvrant en faveur de l’allongement et du renforcement de la participation au marché du travail et en évitant une sortie précoce de celui-ci, tout en tenant compte de l’évolution de l’espérance de vie dans la conception des systèmes de retraite.
Concrètement, l’Union pousse ses membres à repousser constamment l’âge de départ effectif à la retraite, et à maintenir le plus longtemps possible en emploi les retraités.
Le tableau que nous publions ci-dessus détaille pourtant l’intensité des risques pour chaque pays de l’Union. Comme le montre la colonne “pensions”, on voit que certains pays comme la Suède, la Slovénie ou le Luxembourg sont beaucoup plus concernés que la France (dont le poids des pensions dans le PIB devrait diminuer de 2,2 points d’ici à 2070, quand il augmentera de près de 9 points au Luxembourg…).
Ce document tombe à point nommé pour donner de l’air à Emmanuel Macron. Alors que, comme nous l’évoquions récemment, les recommandations semestrielles de l’Union préconisaient une réforme des retraites par harmonisation des régimes et report de l’âge de départ, les analyses à très long terme relativisent fortement la gravité de la situation en France par rapport à certains de ses voisins (notamment certains radins comme l’Autriche, la Hollande ou le Danemark).
Sans surprise, Bruno Le Maire, qui participait à cet ECOFIN, a déclaré aux journées économiques d’Aix qui se déroulaient le week-end précédent que la réforme des retraites était moins urgente qu’avant. Pour Le Maire, mieux vaut désormais anticiper la crise énergétique qui se profile.
Si certains avaient des doutes sur la corrélation de plus en plus étroite entre les orientations européennes et les discours politiques nationaux, ce brutal revirement de l’ECOFIN permet de les dissiper. Il y a trois semaines, la Commission appelait à réformer les retraites en France d’ici à 2025 et Macron disait toute l’importance que cette réforme revêtait pour lui. Aujourd’hui, l’ECOFIN explique que la France est moins en danger que les autres et, magiquement, la réforme des retraites est repoussée aux calendes grecques.
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