Les Européens rejoignent en masse la banque asiatique AIIB, création chinoise qui irrite Washington...
La France, l’Allemagne et l’Italie vont emboîter le pas de la Grande-Bretagne et rejoindre la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures (AIIB), une création de Pékin qui dérange Washington et témoigne une fois encore de la montée en puissance chinoise.
«La France, l’Italie et l’Allemagne annoncent ce jour leur intention de devenir des membres fondateurs potentiels de la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures (AIIB)», ont annoncé dans des communiqués séparés leurs gouvernements.
Avec la Grande-Bretagne la semaine dernière, ce sont quatre grands pays européens qui manifestent en quelques jours leur volonté de participer au développement de l’AIIB, une banque de financement régionale pilotée par la Chine.
Un afflux salué par Pékin qui estime que des pays «hors de la région participeront à accroître la représentativité de l’AIIB», une institution qui viendra encombrer le panorama déjà compliqué des institutions internationales de financement, et qui témoigne de la lutte d’influence que se livrent notamment les deux premières puissances économiques mondiales, Etats-Unis et Chine.
L’objectif de l’AIIB est de financer des projets d’infrastructures dans la région asiatique, entrant donc en concurrence avec la Banque mondiale, une des deux institutions de Bretton Woods (avec le FMI) basée à Washington, ou la Banque asiatique de développement, dominée par le Japon et les Etats-Unis.
Ces institutions internationales sont le théâtre de luttes de pouvoir et d’influence entre grandes puissances. Les institutions de Bretton Woods, et plus particulièrement le FMI, cristallisent un affrontement entre les Etats-Unis et les grandes puissances émergentes, le Congrès américain bloquant un projet de réforme des quote-part de l’institution monétaire qui donnerait plus de poids aux pays émergents.
«Notre crédibilité et notre influence à l’international sont menacées» par ce blocage à regretté mardi devant le Congrès le Secrétaire américain au Trésor Jacob Lew. Et ce, alors même que «de nouvelles institutions voient le jour».
L’AIIB pourrait aussi entrer en concurrence avec la future «banque des Brics», une autre structure de financement pilotée par les grands pays émergents (Brics: Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) qui pourrait voir le jour en 2016.
L’AIIB devrait être elle basée à Pékin et dotée d’un capital initial de 50 milliards de dollars. La Chine a lancé formellement cette initiative en octobre 2014 en signant un protocole d’accord avec 20 autres pays, rejoints depuis par d’autres gouvernements.
- La question des standards -
Les Etats-Unis sont très réticents face à l’AIIB, affirmant être préoccupés par d’éventuels standards de gouvernance trop bas, en matière sociale ou écologique.
«Notre préoccupation a toujours été de savoir si toute nouvelle institution d’investissement adhèrera aux standards élevés en cours chez les institutions financières internationales. Va-t-elle protéger les droits des travailleurs ? L’environnement ? Va-t-elle faire face à la corruption ?», a demandé M. Lew.
Les Européens affirment que leur action au sein de l’AIIB permettra justement de relever les standards.
«L’Allemagne aussi veut que l’AIIB atteigne les standards élevés de la Banque Mondiale et d’autres institutions financières régionales. Nous partons du principe que cela pourra se faire le mieux au moyen d’une coopération constructive dans l’élaboration de ces standards», a déclaré à l’AFP une source proche du gouvernement allemand.
Mais les pays européens, empêtrés dans une croissance morose et régulièrement enclins à vouloir profiter de l’entraînement de la locomotive économique chinoise, ne veulent pas laisser passer l’opportunité de s’attirer les bonnes grâces chinoises.
«Nous voulons apporter une contribution à l’évolution positive de l’économie asiatique, à laquelle les entreprises allemandes prennent activement part», a commenté mardi à Berlin le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble, lors d’une déclaration avec un vice-Premier ministre chinois, Ma Kai.
Présent à Pékin, le président du Parlement européen Martin Schulz a déclaré que de telles adhésions étaient une «bonne chose», et qu’il trouverait «encore mieux si d’autres pays membres rejoignaient» l’AIIB.
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