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MOINS de BIENS PLUS de LIENS

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L'esprit est comme un parapluie = il ne sert que s'il est ouvert ....Faire face à la désinformation


Nuage de Fukushima : quand a réellement débuté la contamination de l’air français ?

Publié par Brujitafr sur 16 Juillet 2011, 22:20pm

Catégories : #AIR DU TEMPS

On nous aurait menti ?

fukushimaCompr_0.jpgSelon la CRIIRAD, le nuage radioactif en provenance de Fukushima serait entré dans l'air français le 22 mars 2011, et non le 24 mars comme l'annonce l'IRSN (Crédits : DigitalGlobe.com)
Pour l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN), le nuage radioactif de Fukushima est entré dans l'air français le 24 mars. Mais la Commission de Recherche et d’Informations Indépendantes sur la Radioactivité (CRIIRAD) affirme que la contamination a débuté le 22 mars, soit deux jours plus tôt. Qu'en est-il réellement ? Le Journal de la Science a mené l'enquête.

L’affaire débute le 25 mai 2011, soit 2 mois et demi après la destruction de la centrale nucléaire de Fukushima par le tsunami. Ce jour-là, la CRIIRAD publie sur son site un communiqué qui met gravement en cause l’IRSN. Dans ce communiqué (communiqué de la CRIIRAD du 25 mai 2011), la CRIIRAD affirme que « les masses d’air contaminé par les rejets radioactifs de la centrale nucléaire de Fukushima sont arrivées 2 jours avant la date indiquée par l’IRSN ». Soit le 22 mars 2011, au lieu du 24 mars. Dans la foulée, la CRIIRAD annonce également qu’elle saisit le gouvernement et l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) d’une demande d’enquête visant à déterminer les différents niveaux de responsabilité de l’IRSN dans cette affaire.

L’accusation est lourde. Certes, entre la CRIIRAD, une association indépendante de scientifiques créée en 1986 suite au passage du nuage de Tchernobyl sur la France, et l’IRSN, organisme public créé en 2001 par l’Etat afin de travailler sur les risques nucléaires et radiologiques, les relations n’ont pas toujours été au beau fixe. Pourtant, ces deux institutions ont aussi montré par le passé qu’elles pouvaient s’accorder sur des questions importantes, comme par exemple l’évaluation de l’impact environnemental de la catastrophe de Tchernobyl en France. Cette étude, menée en 2005 par l’IRSN, était en effet venu confirmer les résultats avancés jusque-là par la CRIIRAD.

Pour la CRIIRAD, le nuage contaminé de Fukushima est arrivé en France le 22 mars

 

La question se pose donc : La CRIIRAD a-t-elle raison lorsqu’elle affirme que l’IRSN a livré au public une date trop tardive concernant l’arrivée du nuage radioactif de Fukushima ? Pour tenter d’y voir plus clair, nous avons tout d’abord contacté par téléphone le physicien Roland Desbordes, président de la CRIIRAD. Sans surprise, ce dernier maintient la version livrée par le communiqué de la CRIIRAD : « l’IRSN s’est de toute évidence trompé : ils affirment que c’est le 24 mars qu’une concentration en iode 131 supérieure aux seuils de détection a été décelée pour la première fois, dans une station de mesure du Puy de Dôme. Or c’est faux. La contamination a débuté plus tôt, vraisemblablement le 22 mars, date à laquelle le nuage est arrivé en Europe du Nord », explique Roland Desbordes.

Quels sont les éléments qui permettent à Roland Desbordes d’affirmer que le nuage de Fukushima a pénétré en France dès le 22 mars ? Tout simplement la consultation des données fournies par le Réseau National de Mesure, un organisme dont la mission est de recueillir les résultats de surveillance de la radioactivité de l’environnement fournis par une vingtaine d’acteurs publics et privés du nucléaire français, puis de les communiquer au public : « Nous avons épluché toutes les données du Réseau National de Mesure correspondant à cette période, poursuit Roland Desbordes. Et ces données mentionnent que la contamination du territoire a en fait débuté dès le 21 mars. Même si, en fait, nous pensons plutôt qu’il s’agit du 22 mars, car c’est seulement à cette date que le nuage a réellement commencé à toucher l’Europe »

IRSN : « Une erreur d’interprétation des données a été commise par la CRIIRAD »

 

Il y a donc bien un décalage entre la date annoncée par le Réseau National de Mesure, sur laquelle s’appuie la CRIIRAD, et celle du 24 mars avancée par l’IRSN. Une situation d’autant plus étonnante que le Réseau National de Mesure est ni plus ni moins géré… par l’IRSN lui-même !
Pour comprendre l’origine de décalage, nous avons contacté Jean-Marc Peres, chef du service d’étude et de surveillance de la radioactivité dans l’environnement à l’IRSN. Pour ce dernier, la CRIIRAD a tout simplement commis une erreur de lecture dans les données fournies par le Réseau de Mesure : « Pour chaque prélèvement, le Réseau National de Mesure affiche une date, mais il s’agit uniquement de la date du début du prélèvement, nous explique Jean-Marc Peres. Or, un prélèvement dure souvent plusieurs jours. Prenons l’exemple de la mesure en iode 131 effectuée sur la station du Puy de Dôme par nos soins, qui avait révélé le début de la contamination de l’air français : ce prélèvement a commencé le 21 mars, mais il s’est achevé le 24 mars. Pour ce prélèvement, le Réseau National de Mesure a donc affiché la date de début, soit le 21 mars. Mais cela ne voulait pas dire que la contamination avait débuté le 21 mars. En fait, cette mesure nous indiquait simplement que la contamination avait eu lieu entre le 21 et le 24 mars, c’est tout ! ». La CRIIRAD aurait donc été abusée par le mode de présentation des résultats du Réseau de Mesure, qui n’affiche que la date de début des prélèvements. Ce que l’IRSN défend dans un document intitulé « Position de l’IRSN sur les critiques de la CRIIRAD relatives à la surveillance environnementale en France après Fukushima », publié le 16 juin.

Et d’ailleurs, depuis la catastrophe de Fukushima, force est de constater que l’IRSN n’a jamais manqué de mentionner lorsque ses prélèvements étaient effectués sur plusieurs jours. Ainsi, concernant le cas du prélèvement effectué au Puy de Dôme, l’IRSN publiait dès le 26 mars un bulletin d’information dans lequel il mentionnait que « des traces d’iode 131 (0,012 MilliBecquerels / m3 sur la période de prélèvement de 4 jours) ont été mesurées dans l’air prélevé entre le 21 et le 24 mars par la station de l’IRSN installée au sommet du Puy de Dôme » (lire le bulletin d’information de l’IRSN du 26 mars 2011). L’information était donc très clairement présentée…

Le recours aux modélisations de Météo France

 

Mais alors, si les mesures de l’IRSN effectuées au Puy de Dôme indiquent simplement que la contamination a eu lieu entre le 21 et le 24 mars, pourquoi l’IRSN annonce-t-il que la contamination a eu lieu très précisément le 24 mars ? Pour cela, l’IRSN s’est tout simplement appuyé sur les modélisations de Météo France, qui prévoyaient l’arrivée du nuage de Fukushima le 24 mars : « Les relevés du Puy de Dôme ne pouvaient pas nous indiquer le jour précis de la contamination. Alors, nous avons retenu l’hypothèse d’une arrivée de l’air contaminé en France au 24 mars, qui était la date calculée par la modélisation de la dispersion atmosphérique à l’échelle mondiale effectuée par Météo France ».

En attendant, si l’erreur d’interprétation de la CRIIRAD semble avérée, on peut tout de même se demander pourquoi le Réseau National de Mesure n’indique que la date de début des prélèvements : « Le choix de mentionner uniquement la date de début du prélèvement est un choix délibéré qui a été effectué par le Réseau National de Mesure afin de ne pas alourdir la présentation des résultats », indique Jean-Marc Peres. Si l’on peut entendre cet argument, force est toutefois de constater que le site du Réseau National de Mesure gagnerait à présenter plus clairement ses résultats au public. Par exemple, en ajoutant la date de fin des prélèvements, lorsqu’ils ont été effectués sur plusieurs jours. Ou, au moins, en signalant explicitement aux internautes lorsque les prélèvements ont été effectués sur plusieurs jours.

Mesure de la radioactivité : les prélèvements quotidiens ont été moins sensibles que les prélèvements menés sur plusieurs jours

 

Une question demeure toutefois : lorsque la centrale de Fukushima a commencé à produire des émissions radioactives, pourquoi l’IRSN n’a-t-il pas effectué des mesures quotidiennes de la radioactivité de l’air français plutôt que des prélèvements sur plusieurs jours, afin de détecter plus précisément le jour de l’arrivée du nuage radioactif ? En fait, il s’avère que l’IRSN a bel et bien mené aussi des prélèvements quotidiens. Résultat ? Jusqu’au 24 mars inclus, ces prélèvements quotidiens n’ont pas permis de détecter une quelconque hausse de la radioactivité de l’air français : « Ce n’est seulement qu’à partir du 25 mars que des prélèvements quotidiens, effectués à Saclay, Orsay ou encore Civaux, ont commencé à livrer des valeurs en iode 131 supérieures aux limites de détection », révèle Jean-Marc Peres. Et c’est logique : un prélèvement quotidien analyse une plus faible quantité d’air, et il est donc moins sensible qu’un prélèvement effectué sur plusieurs jours ». Et les prélèvements quotidiens effectués à cette période par les balises de la CRIIRAD n’ont d’ailleurs rien montré non plus, comme nous le révèle Roland Desbordes : «Nous avons évidemment effectué des prélèvements quotidiens durant toute cette période, à l’aide de nos stations situées dans le Sud-Est de la France. Mais nous n’avons relevé aucune valeur supérieure aux limites de détection ». Sur ce point-là au moins, la CRIIRAD et l’IRSN s’accordent donc…

La nécessité d’une meilleure communication entre les acteurs du nucléaire français

 

Au final, si la polémique n’est pas encore close (il faudra attendre les résultats de l’enquête demandée par la CRIIRAD), elle met en lumière un fait préoccupant : il existe un problème de communication flagrant entre ces acteurs clés du nucléaire français que sont l’IRSN, la CRIIRAD ou même le Réseau National de Mesure (dont les résultats gagneraient probablement à être présentés de façon plus claire). Car à l’évidence, la CRIIRAD aurait facilement pu corriger son erreur d’interprétation si elle avait préalablement contacté l’IRSN. Au vu de la gravité des évènements de Fukushima, et conséquemment des inquiétudes croissantes que le public nourrit à l’égard de l’énergie nucléaire, il est donc à souhaiter que ces acteurs parviennent à communiquer entre eux d’une façon plus apaisée, afin d’être en mesure d’informer le public de la façon la plus transparente et la plus complète possible.

Le journal de la science Par "wikistrike"

 

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