Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

MOINS de BIENS PLUS de LIENS

MOINS de BIENS PLUS de LIENS

L'esprit est comme un parapluie = il ne sert que s'il est ouvert ....Faire face à la désinformation


La taxe écologique va servir à... financer une autoroute

Publié par Brujitafr sur 12 Juillet 2013, 19:56pm

Catégories : #INSOLITE

Ministre et élu de la Saône et Loire, Arnaud Montebourg a annoncé le lancement de la mise à deux fois deux voies de la route dite RCEA (Route centre Europe Atlantique). Mais comment financer cette transformation autoroutière ? Par les recettes de la taxe écologique sur les poids lourds. La pollution va donc financer... la création de pollution supplémentaire.


La Saône-et-Loire a connu en ce 11 juillet, à Charolles, un beau moment d’unanimité, dont notre classe politique est si avare. Le déplacement de deux ministres, celui des Transports, Frédéric Cuvillier, et le local de l’étape, ancien président du Conseil général et actuel ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, a été l’occasion d’annoncer sous des applaudissements nourris, l’accélération des travaux en vue de passer à deux fois deux voies la Route Centre Europe Atlantique dite RCEA (1).



Frédéric Cuvillier (à gauche, touchant la rambarde) et Arnaud Montebourg

En projet depuis des décennies, cette mise à 2x2 voies est demandée par la quasi-totalité des élus locaux, et ce afin de réduire l’insécurité routière de cette route dangereuse (2). Or, le passage à 2x2 voies requiert des budgets que l’Etat a eu du mal à réunir jusqu’à présent, ce qui a amené le précédent gouvernement à envisager la mise en concession de cette route nationale.

C’était sans compter sans la créativité du chantre des gaz de schiste écologiques, Arnaud Montebourg. Durant le débat public de 2010-2011 sur la mise à 2x2 voies de la RCEA, il avait proposé les recettes de la part départementalede l’éco-taxe poids-lourds. Bien qu’initialement réservée au financement d’infrastructures de fret ferroviaires, certains sénateurs ont amendé la loi Grenelle2 afin de financer des infrastructures routières dont le bilan carbone serait jugé positif…

S’engouffrant dans la brèche, le ministre a joué de ses relations pour inscrire la RCEA au rang de priorité. Sommé de faire un geste en faveur de l’écologie, le Premier Ministre a profité du plan d’investissement d’avenir pour annoncer que l’Etat mobiliserait les sommes nécessaires à la réalisation de nombreuses infrastructures… autoroutières, RCEA comprise.

Telle qu’utilisée aujourd’hui, l’éco-taxe, perçue sur les poids lourds, servirait donc à financer la construction d’autoroutes pour les camions. On taxe donc la pollution d’aujourd’hui pour financer la pollution de demain… Le département de Saône-et-Loire est ainsi appelé à injecter 2,5 millions d’euros chaque année au titre des recettes de l’éco-taxe poids lourds.

Une alternative moins coûteuse est possible

On pourrait reconnaître que, face à l’insécurité routière, les polémiques sont déplacées. A la nuance près que si la mise à 2x2 voies est une option, elle ne constitue pas la solution exclusive à l’insécurité routière sur ce tracé. Durant le débat public, quelques associations ont proposé de réfléchir aux causes de l’accidentologie afin d’y répondre le plus rapidement possible.

Une cause principale est le fait que cet axe est massivement utilisé par des camions conduits pour la plupart par des routiers étrangers qui ne sont pas soumis aux contraintes de la réglementation française. Réduire le nombre de camions en circulation en développant le fret ferroviaire permettrait ainsi d’agir sur les causes de l’insécurité.

La multiplication de portions à 110 km/h, entrecoupée de portions à 90 km/h, incite également les automobilistes à rouler vite. L’accoutumance à la vitesse explique pour partie les accidents constatés sur les zones à 90 km/h.

De fait, il serait donc possible d’agir vite et à moindre coût en multipliant les contrôles radars, tout en mettant en œuvre des doubles lignes blanches et une signalisation adaptée rappelant la dangerosité de cet axe routier.



Faisant suite à ces propositions portées par les associations durant le débat public, des aménagements ont été réalisés. Ils semblent avoir été efficaces : selon Daniel Bursaux, directeur général des infrastructures, des transports et de la mer, et Dominique Ritz, sous-directeur de l’aménagement du Réseau Routier National, auditionnés le 26 février dans le cadre du groupe de travail « sobriété énergétique » du débat national sur la transition énergétique, le nombre d’accidents aurait, en 2012, sensiblement baissé sur la RCEA. Or, puisque le passage à 2x2 voies ne serait effectif qu’en 2020 ou 2025, rien n’interdit de mettre en oeuvre les mesures permettant de sauver des vies, ici et maintenant. Et si les accidents se réduisaient, la transformation autoroutière n’aurait plus de vraie raison d’être...

Mais pour certains élus, il s’agit du projet de leur vie. A Charolles, le 11 juillet 2013, ils étaient réunis autour de deux ministres venus leur dire que l’unanimité est possible, en écartant les sujets qui fâchent : le pétrole, le climat, le bruit, les microparticules…

En attendant, comme osait le dire le député de Mâcon, « nous voulons les travaux et les pelleteuses en 2014 ». Pendant ce temps, un débat national sur la transition énergétique a lieu à Paris envisageant une autre mobilité. Loin… si loin de Charolles.

...............

Notes :

(1) La RCEA comprend a deux branches, nord et sud, partant respectivement de Châlon et la branche sud de Mâcon. La mise à 2x2 voies va jusqu’à Montmarault, dans l’Allier. La partie située dans l’Allier sera sous concession puisque ce département (dirigé par un communiste) a opté pour une réalisation "rapide", d’ici à 2020, sous concession APRR.

(2) Sur l’accidentologie, voir aussi ici.



 Source : Stephen Kerckhove pour Reporterre 

Commenter cet article

Archives

Nous sommes sociaux !

Articles récents

weblogs