Le calme semblait en partie revenir en Nouvelle-Calédonie jeudi matin. L'état d'urgence demandé par Emmanuel Macron est entré en vigueur à 5 heures (20 heures mercredi, heure de Paris). Dans ce cadre, Gabriel Attal a annoncé le déploiement de l'armée pour protéger l'aéroport de Nouméa et l'interdiction de TikTok, qui serait utilisé par les émeutiers. Gérald Darmanin, lui, a assigné à résidence cinq indépendantistes radicaux. Après trois nuits d'émeutes qui ont fait 4 morts, dont un gendarme, Emmanuel Macron a proposé aux élus une rencontre par visioconférence ce jeudi pour tenter de résoudre une crise notamment provoquée par une réforme constitutionnelle contestée.
Nouvelle-Calédonie : "Ce n’est pas un mouvement social qu’on va tenter de mater, c’est un peuple qui revendique sa pleine souveraineté !" @JVCastorGuyane pic.twitter.com/23gTiwVRnN
— Bernard GEORGES 🇺🇳🏳️🌈🌍🌎🌏 (@BdGEORGES) May 16, 2024
Déploiement de l'armée
« Des militaires des forces armées sont déployés pour sécuriser les ports et l'aéroport de Nouvelle-Calédonie », a annoncé Gabriel Attal. Le haut-commissaire sur ce territoire, Louis Le Franc, avait demandé le renfort de l'armée pour protéger l'aéroport de Nouméa, vital pour l'approvisionnement de la Nouvelle-Calédonie.
Pour contenir les émeutes, d'importants effectifs de policiers et de gendarmes, dont des éléments de leurs deux groupes d'élite, le GIGN et le RAID, ont été mobilisés. D'autres renforts étaient en cours d'acheminement dans l'archipel, selon Gérald Darmanin. D'après le ministère, 1 800 policiers et gendarmes y étaient déployés mercredi et 500 de plus y arriveront dans les heures qui viennent.
70 interpellations en 24 heures
Environ 70 nouvelles interpellations ont eu lieu sur les dernières 24 heures, selon le Haut-commissariat de la République Louis Le Franc, pour un total de 200 depuis lundi. Selon Sonia Backès, ex-secrétaire d'État et principale figure du camp non-indépendantiste, la troisième nuit d'émeutes a été moins virulente que les précédentes. « Une nuit beaucoup plus calme à peu près partout », écrit-elle sur sa page Facebook, « due à la mobilisation exceptionnelle des Calédoniens qui protègent leur quartier […] et à la présence beaucoup plus importante des forces de l'ordre » notamment. Le bâtiment du Sénat coutumier a cependant été incendié dans la nuit de mercredi à jeudi, sans que l'on sache pour l'instant l'ampleur des dégâts.
Macron propose une visioconférence aux élus
« Le chef de l'État présidera un conseil de défense et de sécurité nationale sur la situation en Nouvelle-Calédonie jeudi à 11 h 00. À l'issue, il a proposé aux élus calédoniens un échange par visioconférence », a déclaré la présidence.
TikTok bloqué
Dans le cadre de l'état d'urgence, Gabriel Attal a annoncé l'interdiction du réseau social TikTok pour limiter notamment les contacts entre émeutiers, à la demande de Louis Le Franc. Cette interdiction « est en vigueur » et « fonctionne opérationnellement » sur les téléphones portables dans l'archipel, a précisé Matignon mercredi soir. « C'est l'office des postes et des télécommunications de Nouvelle-Calédonie (établissement public du gouvernement de Nouvelle-Calédonie) qui intervient depuis hier pour bloquer les accès à l'application TikTok », a-t-on ajouté.
À lire aussi Nouvelle-Calédonie : la réforme constitutionnelle adoptée par les députés, Macron inflexibleSur le réseau X, le juriste Nicolas Hervieu qui enseigne à Sciences Po et à l'université d'Évry, a estimé qu'il s'agissait une décision « sans précédent » et jugé que sa légalité était « discutable » bien que liée à l'état d'urgence.
Cinq indépendantistes radicaux assignés à résidence
Gérald Darmanin a assigné à résidence cinq indépendantistes radicaux. « Je viens de signer les cinq premiers arrêtés d'assignation à résidence de responsables radicaux et violents », a indiqué le ministre de l'Intérieur sur X. « Sur mon instruction, des perquisitions administratives seront menées par les forces de l'ordre immédiatement », a-t-il ajouté. Il s'agit de cinq personnes appartenant à la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), frange la plus radicale du Front de libération Kanak socialiste (FLNKS), a-t-on précisé de source proche du dossier
Nouvelle-Calédonie : l'armée déployée, TikTok interdit, une visioconférence proposée par Macron
L'état d'urgence est entré en vigueur dans l'archipel, jeudi matin, après trois nuits d'émeutes qui ont fait 4 morts dont un gendarme.
De vraies scènes de guerre, avec “une menace à 360 degrés”, explique un gendarme mobile. Le GIGN est bel et bien déployé. L’état d’urgence débute à 20h (heure )
📍Des vidéos me parviennent de #NouvelleCalédonie. De vraies scènes de guerre, avec “une menace à 360 degrés”, explique un gendarme mobile.
— Geoffroy Antoine (@GeoffroyAntoin2) May 15, 2024
Le GIGN est bel et bien déployé. L’état d’urgence débute à 20h (heure 🇫🇷) ⬇️ pic.twitter.com/WayHbFL0Np
Couvre-feu, affrontements : comprendre la situation très tendue en Nouvelle-Calédonie
Depuis l’annonce d’une révision constitutionnelle visant à élargir le corps électoral, l’archipel est en proie à de vives tensions entre indépendantistes et loyalistes.
Mais comment expliquer un tel embrasement et quelle est la situation actuelle ? Tour d'horizon.
Une révision constitutionnelle au cœur des tensions
À 17 000 kilomètres de Nouméa, capitale de la Nouvelle-Calédonie, se joue un vote décisif. Ce mardi 14 mai, l'Assemblée nationale doit se prononcer sur le projet de loi de révision constitutionnelle. Celui-ci doit élargir le corps électoral de l'archipel en accordant le droit de vote aux personnes installées depuis au moins dix ans en Nouvelle-Calédonie.
Jusqu'à présent, seules les personnes ayant vécu en Nouvelle-Calédonie entre 1988 et 1998 ou dont les parents ont été dans ce cas peuvent participer au scrutin. D'après un rapport du Sénat, plus de 25 000 personnes pourraient ainsi voter pour la première fois, soit une augmentation de plus de 14 % du corps électoral.
Pour justifier cette révision, le ministre de l'Intérieur et des Outre-Mer, Gérald Darmanin, avance que la législation actuelle « n'est plus conforme aux principes de la démocratie ». Au contraire, les indépendantistes kanaks – le peuple autochtone de l'île – estiment que cette mesure risque de diluer le poids de la communauté kanake.
Ce projet intervient deux ans et demi après le troisième et dernier référendum sur l'indépendance, qui avait vu le « non » l'emporter à chaque fois, en 2018, en 2020 et en 2021, même si le dernier vote avait été boycotté par les indépendantistes.
Coups de feu, maisons brûlées…
Dans la nuit du lundi 13 au mardi 14 mai, alors que les débats débutaient au Palais-Bourbon à Paris, la situation s'est envenimée sur l'archipel. Des émeutes ont éclaté et plusieurs habitations et bâtiments ont été brûlés. Une trentaine de commerces, de sites industriels et d'autres activités auraient ainsi été victimes du feu. Une usine spécialisée dans l'embouteillage a notamment été volontairement incendiée et entièrement détruite lundi soir.
A Normandie, les pompiers tentent toujours d'éteindre les incendies de la zone industrielle alors que les manifestants sont toujours présents non loin de là pic.twitter.com/ghs99Du1tM
— NC La 1ère (@ncla1ere) May 14, 2024
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