Jean-Marie Delarue, président de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), qui a en charge de contrôler les demandes des services de renseignement, est vent debout contre le projet de loi Renseignement. Pas seulement parce qu'il supprime la CNCIS, mais parce qu'il bafoue nombre de garanties pour la protection des libertés.
L'article que nous publiions ce matin sur les conflits d'intérêts de Jean-Jacques Urvoas (rapporteur d'un projet de loi sur le renseignement qui supprime la CNCIS dont il est l'un des trois membres, pour la remplacer par une nouvelle autorité dont il pourrait devenir membre), n'a pas suscité de grandes réactions. Mais l'interview cinglante accordée à AEF par le président de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), Jean-Marie Delarue, pourrait achever de convaincre ceux qui douteraient encore qu'il y a bel et bien un problème.
"La CNCIS a rendu un avis sur le projet de loi qui dit des choses à peu près semblables à celles que je viens d’exprimer. Jean-Jacques Urvoas a signé cet avis", lance M. Delarue, extrêmement remonté contre le projet de loi dont l'examen débute ce mardi soir en commission à l'Assemblée nationale. "Lorsqu’il m’a entendu à l’Assemblée en tant que rapporteur du projet de loi, mercredi dernier, il n’a donc pas été surpris du langage que je lui ai tenu".
Mais M. Urvoas sera-t-il le porte-voix d'une CNCIS qui a beaucoup de mal à dire sur la loi présentée par le Gouvernement, ou sera-t-il le relais complaisant et intéressé d'une politique décidée par la majorité dont il est membre, et dont le premier ministre Manuel Valls a fait une priorité et un objectif personnel ?
La liste des griefs contre le projet de loi Renseignement, qui renforce notre conviction d'illégalité au regard du droit international, est longue et précise. "Cette insuffisance de contrôle et l’élargissement des personnes susceptibles d’être surveillées me font dire que le projet de loi relatif au renseignement n’est pas adapté aux libertés publiques et à la sécurité du pays", conclut-il, en demandant à ce qu'il soit "amend(é) sérieusement". Citons quelques uns des principaux reproches et constats :
"Si l’évolution des technologies doit conduire à moderniser la loi de 1991, la contrepartie doit être que cessent les pratiques de surveillance illégales. À ce propos, il est surprenant d’entendre certains responsables dire que ces pratiques sont dans une "zone grise". Elles sont parfaitement illégales !" ;
"Le président de la CNCTR (Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement) n’aura accès qu’à des registres tenus sur les dires d’un tiers intéressé. Y aura-t-il des dissimulations ? C’est en tout cas possible" ;
La CNCTR "ne pourra contrôler que ce qu’on voudra bien qu’elle contrôle. On est en train d’ériger un colosse aux pieds d’argile, un contrôleur dépendant d’un tiers pour accéder aux données qu’il est chargé de contrôler. Il y a donc un affaiblissement très net du contrôle" ;
"Le texte prévoit la possibilité de suivre des personnes qui, "volontairement ou non", ont servi d’intermédiaire à une personne qui trempe dans une affaire louche. Si cette dernière prend un taxi, le chauffeur va donc pouvoir être écouté ! Le projet banalise donc totalement la surveillance de personnes qui n’ont rien à voir avec l’enquête." ;
"Dans les techniques offertes par le projet de loi, il y a des techniques évidentes de pêche au chalut. La première concerne les dispositifs techniques qui permettent de recueillir toutes les données de connexion des téléphones portables situés à proximité. Par exemple, si vous placez ce dispositif à la gare du Nord pendant six mois – à savoir la durée maximale prévue par le texte — ce sont les données de plusieurs millions de personnes qui pourront être collectées et conservées pendant cinq ans" ;
Avec les fameuses boîtes noires de surveillance par algorithmes, "cela va donner lieu au recueil de milliards de données pour identifier la quinzaine de personnes ayant appelé un terroriste présumé ! Le recueil et la conservation de milliards de données pendant cinq ans sont-ils proportionnés au besoin de trouver, par exemple, une douzaine de personnes suspectées de terrorisme ? Je suis certain du contraire." ;
Source
Dictature en marche. Ils deviennent dangereux.
Nous vivons une période folle de l'histoire : un gouvernement ultra minoritaire, donc sans aucune légitimité, prend des mesures coercitives contre les Français.
Ils sont nos ennemis.
Dictature en marche : ils deviennent dangereux
(photo : CC Claude Truong-Ngoc)
Commenter cet article