Il était annoncé, il a été approuvé ce vendredi matin. Le plan de lutte contre la fraude sociale, présenté par le secrétaire d’Etat Bart Tommelein (Open VLD) a désormais passé le cap du conseil des ministres. Le texte comprend 85 points et non des moindres.

Il prévoit ainsi la création d’un point central de contact pour signaler (mais pas de manière anonyme) les situations de fraudes avérées ou suspectées avec centralisation sur un site internet unique. Par ailleurs, un système d’enregistrement électronique des travailleurs sera instauré pour le secteur de la viande, à l’instar de ce qui existe déjà depuis un an dans la construction, afin de pouvoir détecter plus facilement les situations de détachements frauduleux ou de faux indépendants. Electronique, la signalisation par les salariés de leurs jours de chômage temporaire le sera également. Enfin, les banques de données de l’administration fiscale et des services de l’inspection sociale s’échangeront les informations afin de tendre vers plus d’efficacité encore dans leurs contrôles.

Bart Tommelein espère ainsi doubler les rentrées générées par la lutte contre la fraude sociale, en les faisant passer de 50 à 110 millions.

Mais une mesure retient particulièrement l’attention, même si elle avait déjà été évoquée lors de la présentation de l’accord de gouvernement : les données énergétiques (consommation de gaz, d’eau et d’électricité) seront désormais transmises de manière « systématique et anonymisée » par les entreprises d’utilité publique à la Banque Carrefour de la Sécurité sociale. L’objectif est de détecter la fraude au domicile. Il s’agit ainsi d’établir si la situation familiale d’un demandeur d’emploi correspond bien à ce qu’il a déclaré à l’Onem : un isolé vit-il réellement seul ? Une personne séjourne-t-elle réellement à l’adresse mentionnée ou s’agit-il de percevoir une allocation d’isolé plutôt que de cohabitant ?

« Une consommation singulièrement haute ou basse pourra faire office de « feu clignotant » en vue d’une enquête ultérieure », signale-t-on au cabinet du secrétaire d’Etat à la lutte contre la fraude sociale. On peut toutefois s’interroger sur la solidité de l’anonymat évoqué dans la note gouvernementale et sur les garanties qui seront éventuellement apportées à la commission de protection de la vie privée.

« Le gouvernement s’acharne sur les plus faibles »

La mesure a déjà fait réagir la FGTB. Marc Goblet, son secrétaire général, dénonce « une logique d’inquisition », qui « ne repose pas sur des arguments objectifs ». « Il y a des gens dans ce gouvernement qui ne mesurent pas l’état de pauvreté des allocataires sociaux. Beaucoup doivent faire le choix entre se soigner, se nourrir et se chauffer. Même si la consommation est faible, cela ne veut pas dire que la personne n’habite pas au domicile qu’elle a renseigné ; ou qu’elle a fait une fausse déclaration de composition de ménage. Elles économisent l’eau, le gaz et l’électricité parce qu’elles ne peuvent pas faire autrement. Il suffit de voir le nombre, élevé et en croissance, de compteurs à budget. »

Autrement dit : les données de consommation d’eau, de gaz et d’électricité « ne constituent pas des critères objectifs pour pouvoir dire s’il y a fraude ou non », poursuit le secrétaire général de la FGTB.

Pour Marc Goblet, « le gouvernement s’acharne sur la fraude sociale et sur les plus faibles, mais ne montre pas la même détermination pour lutter contre la fraude fiscale. » Il en veut pour preuve la taxe Caïman. « Sur 57 milliards d’euros qui, selon les Finances et la Banque nationale, seraient disponibles dans des paradis fiscaux (NDLR : hors Suisse, Luxembourg et Etats-Unis), le gouvernement espère récupérer 460 millions d’impôts. Et j’entends les experts fiscaux affirmer qu’il suffira de changer les structures de ces sociétés offshore pour ne rien avoir à payer ».

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